La course

Je ne pensais pas un jour écrire ces deux mots, mais oui je cours.

 Une suite d'événements professionnels m'ont poussée à le faire. Plus précisément, un essoufflement général m'a encouragé à me lancer. Oui c'est curieux de choisir d'enfiler ses espadrilles quand on a du mal à respirer à fond.

Sur la piste, je retracer l'origine de ce déclic. Des couches des événements négatifs, de déceptions, d'incompréhensions, une accumulation de blessures. 

Un jour, je suis rentrée à la maison avec un manteau de couches pesantes sur le dos. La tête basse. Le cœur en miettes. Je suis tranquillement devenue l'anti-modèle de la maman forte, présente et souriante. Et je venais d'habiller inconsciemment mes enfants et mon chum de ce manteau pesant et inutile.

Et j’avais ce besoin de m'isoler comme jamais. Alors voilà, une autre couche encore plus pesante venait de s'ajouter à mon manteau.  La culpabilité. Vous savez cette petite chose qui s'infiltre dans la tête de beaucoup de mamans et qui parfois devient si grande qu'elle prend toute la place. Alors un jour, j'ai explosée.  J'ai pleuré en cachette à l'école où je travaille jusqu'au jour où la cachette n’était plus un critère pour pleurer. Et mes élèves retrouvaient une Madame Catherine les yeux rougis prétextant sans grand talent de soudaines allergies.  Et un jour ma cachette de larmes fut la maison.  En pleine heure de pointe du souper, entre le riz et le poulet. Une maman qui n'en pouvait plus. Le manteau si lourd sur mes épaules ne faisait que se gonfler devenir insupportable.  J'étais en état de survie et je comprenais difficilement comment les autres mamans y arrivaient.  Je me suis même mise à les envier. On sait bien, elles ont quelque chose que je n'ai pas. Mais incapable de savoir quoi. Mon cerveau de toute façon est surchargé et n'analyse plus les situations de la bonne manière. Une sauvegarde de la machine serait nécessaire pour pouvoir effacer tous les dossiers.

 Et puis, il y a toutes ces personnes qui une à une,  me brassent la cage. Entre autres, une amie qui me dit : «Tu sais dans les avions c'est la maman qui met son masque à oxygène en premier pour pouvoir sauver ses enfants ensuite». Bang! Et là si je ne commence pas à enlever les couches qui m'étouffent  je vais crouler sous la lourdeur des épaisseurs.

 Et je pense à toutes mes amies qui se sont remis en forme à travers un horaire de fous. Des amies monoparentales qui jonglent avec les minutes pour en réserver pour elle et ensuite revenir plus forte pour leur marmaille. C’est vrai, dans la vie il n'y a qu'une seule chose que l'on contrôle, c’est notre attitude (Mylène Paquette).  C'est bizarre cette phrase était devant mon bureau toute l'année. Alors c'est ça cette chose que les autres mamans ont et que je dois retrouver...

Alors j'ai acheté des espadrilles.  Parce que oui j'ai oublié de dire que le sport et moi, c’est deux choses! Alors, un jour je commence des intervalles. Et l`a encore Bang! 

Ça rentre dans toutes les cellules de mon corps. 

Je cours et je découvre de nouvelles sensations.

Je cours et je respire mieux (j’ai mis mon masque à oxygène).

 Je cours et j'ai chaud alors j'enlève une couche de mon manteau, puis deux, puis trois.

Je cours et je libère des infos stockées dans mon disque dur.  Je fais de l'espace. 

Je cours et je redécouvre la nature. L’odeur  des lilas, le chant des chardonnerets, du cardinal  et des mésanges.

Je cours et je saute par-dessus les limaces lentes de la piste cyclable  juste pour me rappeler que nous sommes fragiles.

Je cours et je tourne autour du poteau à mi-chemin pour me souvenir d'avoir des objectifs si petit soient-ils.

 Je cours et je sens que je me rattrape là au bout du chemin.

 Je cours et parfois entre deux intervalles, je prends des photos de ce que trouve beau, la lumière, les arbres. Pour me rappeler de qui je  suis. Pour me reconnecter à mes passions.  

Je cours et je reviens à la maison « libérée, délivrée!!!!  Non je ne pleure pas.  Je suis là» avec mes snicks. La tête haute. Le cœur gonflé.

 

 

Catherine